Que voulons nous faire de l’économie de demain ? Travailler autrement, partager, coopérer, et régénérer : tels sont les ingrédients essentiels qui ont guidé les débats des Université d’Eté de L’économie de Demain (UEED) à Paris le 30 août 2023, autour d’un thème : Vers une économie de la paix.
Voici les enseignements principaux qui viennent aussi renforcer nos convictions chez LĒRENN
1. Le régénératif au cœur des discussions
L’économie est, par nature, totalement reliée à l’enjeu de l’habitabilité de notre planète :
- Emmanuel Faber nous a en effet rappelé l’étymologie du mot « économie » : oïkonomia = l’art de bien gérer la maison, et par extension ses biens, son pays… Bref, là où nous habitons !
- Faire de l’impact sa boussole : certes, c’est du bon sens, mais est-ce que toutes les démarches RSE et d’engagements au-delà (changement de modèle économique…) sont aujourd’hui guidées par cette boussole de l’impact, environnemental et social, avec des indicateurs de mesure ?
Or, la biodiversité nourrit l’économie :
- Quel bien cela fait d’entendre ce rappel, clamé plus haut et plus fort : la nature nous apporte tous les jours des services, sans lesquels nous ne pourrions plus vivre : se nourrir, se loger, communiquer, se déplacer, innover (bio mimétisme)…
- Et en plus, c’est BEAU ! Or, l’émerveillement est un puissant levier pour embarquer vers le changement avec la banane au visage.
Finalement, l’importance accordée aux principes régénératif lors de cette journée a conforté nos choix pour accompagner les entreprises, même si cela semble utopiques pour certaines. Mais visualiser la destination dès maintenant donne l’énergie nécessaire pour s’engager et agir, plutôt que de s’arrêter aux freins au changement…
Avoir le pessimisme de l’intelligence et l’optimisme de la volonté
Le philosophe Antonio Gramsi cité aux UEED par Françoise Raoul-Duval, Groupe Diam
2. La coopération renforce la robustesse du modèle économique d’une entreprise et de sa filière, et nourrit des relations apaisées
Pour cela, on passe d’une logique de concurrence – véritable guerre économique aux impacts délétaires sur l’humain et l’environnement – à une logique de co-opétition, où l’on coopère avec des « confrères » qui partagent nos valeurs et visions communes.
Quelques exemples de co-opétition :
- Dans le textile, Thomas Huriez – fondateur de la société 1083 a participé à faire en sorte de remettre en marche en France la filière textile, notamment avec des entreprises comme Loom, permettant ainsi de renforcer toute la chaine de valeur de la filière et rendre ce secteur plus robuste.
- Dans la grande conso, Jules Coignard – Circul’R a participé à faire se réunir les acteurs de la GMS pour travailler sur une PLV mutualisée entre plusieurs marques, avec un seul meuble détenu (propriété du magasin) que l’on rhabille en fonction des promotions des marques. Auparavant, chaque marque fabriquait, livrait et détruisait ensuite sa PLV. Une belle économie de déchets !
- Dans le domaine du recrutement, François Moreau – Randstad – a fait partie de la réflexion avec d’autres acteurs de l’emploi intérimaire pour pousser le gouvernement français à créer le CDI intérimaire pour réduire la précarité.
3. Démocratiser la gouvernance offre la garantie d’une mise en œuvre réussie et pérenne de la démarche RSE
A la clé : plus d’équité et de justice sociale pour apaiser les tensions actuelles et une équipe porteuse de l’énergie nécessaire pour engager ces transitions. Les exemples :
Agnès Audier
- « Le conseil d’administration doit être formé et alimenté avec ces nouveaux enjeux pour être à même de prendre les bonnes décisions, au même titre qu’ils sont montés en compétence sur les enjeux du digital. »
Tiffany Foucault – Fnac Darty
- « Aujourd’hui, on doit absolument veiller à donner du sens auprès de tous les collaborateurs mais aussi du conseil d’administration : le but ultime de la transformation, c’est bien de préserver l’habitabilité de la planète. Je ne peux plus entendre en 2023 que la RSE n’est pas rentable ! C’est elle qui pourra aider à remplir cet objectif de survie de l’humanité. »
Mélanie Berger – Club des Jeunes Dirigeants
- « Laissez les salariés décider de la semaine de 4 jours plutôt que cela soit décidé unilatéralement par la direction. »
4. Repenser « hors du cadre » le futur du travail
Arrêtons de traiter les symptômes des problèmes de recrutement et de fidélisation des collaborateurs et traitons les maux, en réfléchissant au sens du travail, au partage de la valeur et au temps.
Selon Laurent Escure, UNSA, il y a deux problématiques majeures associées au recrutement et à la fidélisation des collaborateurs en France :
- Une mauvaise adéquation entre la formation et le travail attendu en entreprise
- Un déficit de management (trop injonctif, pas assez basé sur la confiance)
Pour tenter d’endiguer le problème, Baptiste Hamain de l’entreprise Pimpant insiste sur la nécessité de faire une phase d’expérimentation pour adapter la façon de travailler.
Un groupe de travail impulsé par le Mouvement Impact France propose d’inscrire dans la loi le principe d’un cadre expérimental pour permettre aux entreprises d’expérimenter de nouvelles pratiques.
5. Incarner des valeurs indispensables
Le courage de changer de paradigme, de renoncer, de restaurer notre relation au vivant, d’aligner son cœur, son corps et sa tête dans ce changement de paradigme.
Il ne faut plus se limiter aux données scientifiques, au quantitatif et au cerveau « froid », pour s’ouvrir au qualitatif, à l’intuition, au cœur « chaud » et aux émotions.
6. Il ne peut y avoir de transition écologique sans justice sociale
Yamina Saheb du GIEC l’atteste : certaines orientations pour lutter contre le dérèglement climatique ont des répercussions sociales négatives ; il est nécessaire d’intégrer la justice sociale au cœur des stratégies environnementales pour en faire l’étoile qui guide nos actions.
L’initiative internationale Earth for all, présentée par Sandrine Dixon-Declève, Co-Présidente du Club de Rome, œuvre en ce sens, pour que nos sociétés humaines puissent garantir à leurs populations un niveau de bien-être décent.
7. Aller au-delà des chiffres et des bilans carbone
Des témoignages de chefs d’entreprise (comme François Guérin, PDG de CETIH, et Président de notre collectif national Dirigeants Responsables) aux experts des données et de la mesure (notamment Jérémie Joos de KPMG, Mathilde Dufour de Mirova…), LĒRENN abonde dans leur sens : ne surtout pas se laisser enfermer et guider par la somme des données disponibles, pour se créer une grille de lecture adaptée à son activité, et se poser les questions fondamentales pour éviter les « usines à gaz » : mesurer pour en faire quoi, pour qui, vers quels objectifs ?
8. Le réemploi comme nouvelle filière industrielle en Europe
La récente loi AGEC (2020), ou loi « anti gaspillage », a permis le développement d’entreprises du réemploi, et de venir challenger la place des filières aval du recyclage. C’est une excellente nouvelle sur de nombreux plans : éviter la création d’une grande masse de déchets, réduire l’extraction de ressources, diminuer la consommation énergétique, créer de nouveaux emplois qui contribuent aux enjeux écologique et sociaux, etc.
On espère que les promesses de Roland Lescure, Ministre délégué chargé de l’industrie, pour soutenir davantage cette filière, seront tenues.
Cette belle journée renforce nos choix sur la manière d’accompagner la stratégie des entreprises, qu’il faut viser la Lune, regarder toutes les étoiles qui peuvent nous éclairer, et voir grand. Qu’il faut du courage pour changer de paradigme, pour renoncer à certaines choses (on va en trouver d’autres bien plus belles), et restaurer notre relation au vivant.
Chez LĒRENN, nous croyons au pouvoir des récits utopistes, de l’humour et de l’optimisme, pour déclencher l’envie de préserver l’habitabilité sur terre.